COMPRENDRE LA CRISE D’UKRAINE
De quel accord d'association avec l'UE s'agit-il ?
Si la foule est descendue dans la rue en Ukraine, c'est parce que le Président Viktor Ianoukovitch a refusé de signer l'accord d'association négocié avec l'Union européenne lors du sommet de Vilnius le 29 novembre 2013. Le rendez-vous lituanien devait lancer le Partenariat oriental de l'Union européenne, porté depuis 2009 essentiellement par deux pays : la Pologne et la Suède. Il s'agit de procéder à un rapprochement entre l'UE et six anciennes républiques soviétiques. L'Azerbaïdjan, l'Arménie et la Biélorussie, comme l'Ukraine finalement, ont refusé de le signer. En revanche, la Georgie et la Moldavie l'ont paraphé. A terme, ces pays espèrent adhérer à l'UE. Une perspective qui ne fait pas l'unanimité parmi les 28. Pour certains, dont la France, association ne signifie pas adhésion. A noter que l'accord d'association, qui impliquerait la création d'une zone de libre-échange, comporterait la nécessité pour l'Ukraine d'opérer des restructurations, synonymes de sacrifices.
Pourquoi le président ukrainien n'a t-il pas voulu signer cet accord ?
Le président ukrainien, suite à des menaces publiques du Kremlin, a opéré une volte-face, en refusant au dernier moment de parapher cet accord d'association. Il semble préférer un rapprochement avec la Russie de Vladimir Poutine, lequel fait pression pour garder ses anciens satellites dans son giron. Le but ? Former avec eux une Union douanière eurasienne d'ici 2015, soit une Union politique et économique. L'Ukraine, berceau historique de la Russie orthodoxe, en constituerait un élément clé.
Les présidents russe et ukrainien, qui s'étaient déjà vus à Sotchi sur les rives de la Mer noire, dans la résidence du Président Poutine, le 6 décembre, se sont rencontrés à nouveau à Moscou le 17 décembre pour l'évoquer et, peut-être signer en catimini ce partenariat stratégique. La contrepartie ? Le Kremlin s'est engagé à acheter pour 15 milliards de dollars d'obligations émises par l'Etat ukrainien. Et la Russie a accepté de baisser d'un tiers le tarif de ces livraisons de gaz à l'Ukraine. Car ce pays dépend de la Russie pour son approvisionnement énergétique. Mais il est aussi un pays de transit : 60 % du gaz russe vers l'Europe passe par l'Ukraine.
Qui est Viktor Ianoukovitch ?
Viktor Ianoukovitch, 63 ans, à la tête du Parti des régions, a été élu président en 2010 et compte bien se représenter en 2015. Celui dont les manifestants réclament la démission a grandi dans l'est de l'Ukraine, le Donbass industriel, une région russophone liée à Moscou. Ex-gouverneur de Donetsk, il avait initialement accédé à la fonction suprême en 2004, avant que n'éclate la Révolution orange, motivée par des soupçons de fraude électorale le concernant : le scrutin a été annulé et de nouvelles élections ont eu lieu.
C'est finalement son rival Viktor Ioutchenko qui a accédé au pouvoir. Mais Viktor Ianoukovitch, élu dans les règles cette fois, lui a succédé en 2010. Aimant la chasse et les voitures de luxe, niant être un leader populiste, il a su transformer son image à grands coups de promesses de « justice sociale ». Président autoritaire, il a favorisé son fils Alexandre, dentiste devenu roi du charbon, à la tête d'une fortune de 100 millions de dollars et l'une des personnalités les plus influentes du pays. Le Président a également fait emprisonner sa rivale, la femme d'affaire charismatique Ioulia Timochenko, condamnée à sept ans de prison pour abus de pouvoir. Or l'Union européenne réclame sa libération.
Que viennent faire les oligarques dans cette affaire ?
Derrière les politiques règnent en réalité ceux qui ont le pouvoir économique : les oligarques ukrainiens. A commencer par l'homme le plus riche du pays, Rinat Akhmetov, 39e fortune mondiale, pape du football national et propriétaire de la chaîne de télévision Ukraïna. Ou encore Dmitro Firtach, qui a bâti sa fortune sur le gaz et l'industrie chimique. Il y a aussi Viktor Pintchouk, un amateur d'art qui organise une conférence annuelle à Yalta sur le choix européen. Ou encore Petro Porochenko, le roi du chocolat ukrainien, qui souffre de l'embargo imposé par Moscou depuis quelques mois. Or ces jours-ci, la rumeur courait selon laquelle les oligarques proches du pouvoir lâcheraient le président Ianoukovitch. N'a-t-on pas vu des images des violences policières sur Ukraïna, une chaîne qui a largement donné la parole aux manifestants anti-gouvernementaux rassemblés autour des barricades, ces citoyens a priori sans véritable leader qui dénoncent d'abord l'affairisme et la corruption des politiques ?
Pourquoi le pays est-il scindé entre est et ouest ?
A Kiev, parmi les slogans criés par les manifestants, il en est un qui revient souvent : « Est et ouest ensemble ». La chose ne va pourtant pas de soi et les clivages ethniques entre l'est et l'ouest du pays sont aujourd'hui aiguisés. Jusqu'à son démantèlement après la Première Guerre mondiale, l'ouest de l'Ukraine faisait partie de l'empire des Habsbourg austro-hongrois. A l'opposé, l'est est russophone et russophile. La population de ce pays, devenu indépendant en 1991 à la chute de l'union soviétique, compte d'ailleurs 17 % de Russes, en majeure partie installés à l'est et au sud. Mais le russe est aussi parlé à Kiev, qui compte 2,8 millions d'habitants. La différence identitaire est aussi religieuse. L'Eglise orthodoxe du patriarcat de Kiev et l'Eglise gréco-catholique (uniate), implantées dans l'ouest du pays, soutiennent les manifestants pro-européens, tandis que l'Eglise orthodoxe du patriarcat de Moscou, installée dans l'est russophone, penche plutôt du côté des intérêts du Kremlin.
Les deux premières se sont beaucoup impliquées dans le mouvement de solidarité en faveur des manifestants. Ces jours-ci, le patriarche de l'Eglise orthodoxe ukrainienne a mis en garde contre un risque de guerre civile dans l'Ukraine divisée.
La vague de manifestation qui secoue l’Ukraine depuis novembre 2013 a conduit à la destitution le 22 février du président Viktor Ianoukovitch. Cette crise est le symbole d’un clivage au sein de la population ukrainienne.
Alors que le pays s'enfonce dans la violence et que jeudi 20 février les affrontements à Kiev ont fait plus de 60 morts, retour sur les origines de cette crise qui déchire l'Ukraine depuis plus de trois mois, quand Bruxelles a décidé de suspendre les négociations avec Viktor Ianoukovitch sur un accord d'association avec l'Union européenne, face aux atermoiements du président ukrainien. Eclairage autour de quelques questions clés pour mieux comprendre les événements actuels. Après dis jours de manifestations, la mobilisation ne faiblit pas. Plus d’un millier de personnes ont passé la nuit sur la Place Maidan (Place de l’Indépendance) et ont afflué vers le Parlement qui doit examiner dans la journée une motion de défiance du gouvernement.
Dans une geste de défiance du gouvernement. Dans un geste de conciliation envers l’opposition, le président de la Rada, Volodymir Rybak, un proche du président Viktor Ianoukovitch a annoncé mettre à l’ordre du jour mardi dernier la question de la défiance du gouvernement, comme le réclamait l’opposition. Ils sont descendus dans la rue et le gouvernement ukrainien a annoncé qu’il renonçait a signer l’accord d’association avec l’union européenne, pourtant en cours de discussion depuis plusieurs années. Mais après les violences policières du weekend contre les manifestants, leur revendication a évolué. Les leaders de l’opposition demandant, depuis lundi, la démission d’Ianoukovitch. Alors qu’à l’échelle du pays, la mobilisation reste relativement modeste, le rapport de force ne semble pas, à ce stade, en mesure d’arriver à cette issue. La plupart des spécialistes insistent sur le fait que les Ukrainiens descendus dans la rue regrettent peut-être que leur pays tourne le dos à Bruxelles, mais ils ne veulent pas pour autant rompre le lien qui les unit à la Russie. C’est sous la pression de la Russie que Kiev a renoncé à un rapprochement entre l’ancien pays de l’URSS et l’U.E. Vladimir Poutine veut garder le contrôle sur les anciens satellites de la Russie.
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